Un Revolver British Bull Dog, qu’est-ce que c’est ?

 Les vrais (les bons), les dérivés (les brutes), et les impropres (les truands)

 

Pour le collectionneur, l’un des réels problèmes de cette catégorie de revolvers réside en l’absence de définition précise de la terminologie « British Bull Dog ». Les experts s’accordent à dire que le terme est apparu en Belgique lorsque les armuriers liégeois commencèrent à copier les armes de Webley, lequel aurait plus tard repris à son compte l’appellation.

 

Table des matières :

 A. Concept initial et design des vrais British Bull Dogs

B. Les dérivés

B1. Revolver Puppy

B2. American Bull Dog

B3. Belgian Bull Dog

B4. Revolvelo

C. Les impropres

C1. Revolver Royal Irish Constabulary (RIC)

C2. Revolver Bossu (ou Hammerless)

C3. Revolver Renforcé

C4. Revolver Velodog

C5. Revolver Explorateur

C6. Revolver Type Lefaucheux

C7. Der(r)inger de gros calibre

D. Le Bulldog moderne de Charter Arms

 

A. Concept initial et design des vrais British Bull Dogs

 

 Avec son concept initial, Webley définit génialement en 1873 les caractéristiques du premier revolver de poche moderne : simplicité, compacité, robustesse, puissance, prix accessible… Rien de surprenant à ce que la concurrence s’empresse de copier ce design novateur que la clientèle réclame. Aucune autre arme de poche de l’époque ne peut rivaliser avec les British Bull Dogs.

 

Les poivrières et Der(r)ingers sont dépassés en capacité, les Lefaucheux et revolvers à percussion annulaire en puissance et en robustesse. Le seul progrès net d’un revolver moderne sur les Bull Dogs consiste en l’invention du barillet basculant disposant d’un dispositif d’extraction simultanée des étuis vides. Ceci étant, et même si ce dispositif facilite et accélère le déchargement et le rechargement de l’arme, il faut se souvenir qu’en usage purement civil il est rarissime d’avoir à recharger rapidement un revolver ! Le bourgeois ou même l’aventurier muni d’une paire de Bull Dogs en calibre 450 pouvait raisonnablement faire face à la plupart des situations de la vie quotidienne.

 

Néanmoins, il n’y a pas de brevet spécifique ni de marque déposée qui protège le terme Bull Dog, ce qui a permis nombre de digressions et variantes autour du concept initial. Une large confusion découle de cette absence de définition claire, que nous proposons de préciser ici.

 

Le terme Bull Dog peut être absent, ou marqué en un seul mot (Bulldog), deux mots  (Bull Dog comme sur les Webley), ou avec un trait d’union (Bull-Dog). L’acception pleine du terme doit, selon nous, être réservée aux armes répondant stricto sensu au design initial de Webley, dont les caractéristiques principales sont rappelées ci-dessous :

 

1. Revolver compact, d’allure ramassée et de petite taille, à canon court, typiquement de 2 pouces 1/2. Les der(r)ingers et diverses poivrières ne peuvent donc être qualifiés de Bull Dogs.

 

2. Carcasse fermée et canon en une seule pièce, non ouvrante ni démontable. Ce critère exclut tous les revolvers à carcasse ouverte ou ouvrante, comme ceux à brisure vers le haut (genre tip-up type SW N°1) ou vers le bas (SW N°3 par exemple), ainsi que les systèmes démontables (type Galand Mignon ou Tue-Tue par exemple), ainsi que les armes à barillet basculant.

 

3. Système d’éjection par une tige montée sur fléau et insérée dans l’axe du barillet amovible (lequel peut être plein, flûté ou cannelé en ovales). Ce critère exclut tous les systèmes à éjection simultanée.

 

4. Portière de chargement généralement placée à droite de la carcasse, et basculant soit vers la droite, soit plus rarement vers l’arrière (à l’instar des revolvers d’ordonnance type Chamelot Delvigne).

 

5. Poignée en bec d’oiseau, avec ou sans busc, et dotée de deux plaquettes vissées. Ce critère exclut les armes à poignée carrée (par exemple Webley RIC).

 

6. Revolver fonctionnant en simple et double action, avec une sûreté par cran de demi-armé ou par mécanisme rebondissant.

 

7. Détente montée sous pontet, ce qui exclut toutes les variantes à détente encastrable, amovible, en anneau ou à la Mexicaine.

 

8. Chien apparent, ce qui élimine les revolvers à chien caréné (hammerless ou bossus).

 

9. Revolver de gros calibre, égal ou supérieur à 10mm en percussion centrale ou annulaire à poudre noire (41 RF, 44, 442, 450, 11mm, 12mm). Les armes de calibres égaux ou inférieurs au 380 seront appelés Puppies, et les revolvers à broche qualifiés de « système Lefaucheux ».

 

Rappelons que même si Webley lui-même produisit des petits revolvers N°2 en calibres 380 et 320, ceux-ci ne furent jamais dotés de l’inscription British Bull Dog (voir la publicité suivante où seul l’exemplaire en calibre 450 porte la mention British Bull Dog).

 

Les revolvers British Bull Dogs furent produits essentiellement à Birmingham et Liège. Un exemple typique de la production britannique est représenté sur la photo suivante.

 

B.  Les dérivés

 Sont considérés comme des dérivés des armes ne répondant pas à un seul des critères précisés ci-dessus, mais respectant pour le reste le concept et le design initial.

 

Les en-têtes de chaque sous-chapitre proposent la terminologie la plus appropriée pour chaque catégorie.

 

B1. Revolver Puppy

Revolver remplissant l’ensemble des critères à l’exception du calibre inférieur à 10mm, le plus souvent calibres européens 380 et 320.

 

 

B2. American Bull Dog

Les variantes des USA respectent l’appellation si l’on fait une exception pour le système simplifié de démontage du barillet (tige non montée sur fléau). Généralement en calibres américains 44, 38 et 32.

 

B3. Belgian Bull Dog

Revolver de poche inspiré du design des British Bull Dogs à l’exception de l’absence d’un pontet et de la présence d’une détente encastrable ou repliable. Ces armes sont le plus souvent chambrées en petit calibre, mais peuvent également se trouver en gros calibre (11mm73 ou 450). Très majoritairement conçus et fabriqués à Liège, d’où la proposition d’appellation Belgian Bull Dog.

 

 

B4. Revolvelo

 Revolver remplissant les critères à l’exception d’une détente en anneau, et donc démuni de pontet. Presque toujours en petit calibre, mais pas exclusivement.

 

 

C.  Les impropres

 Sont considérées comme impropres des armes de poing ne respectant pas plusieurs des critères mais souvent appelés Bull Dogs en raison d’analogies de forme, d’usage et/ou de fonctionnement.

 

C1. Revolver Royal Irish Constabulary (RIC)

 La confusion la plus fréquente et la plus difficile à éclaircir… Leur concept est identique à celui des Bull Dogs, si ce n’est la présence d’une poignée carrée, souvent en une seule pièce. Les revolvers RIC en gros calibres ont été conçus comme des armes de service, trop lourdes et encombrantes pour être considérées comme des armes de poche. Mais les exemplaires en petit calibre sont souvent confondus avec les Bull Dogs dont ils partagent les poids et les dimensions.

 

 

C2. Revolver Bossu (ou Hammerless)

On préfèrera l’appellation « Bossu » plutôt que celle d’Hammerless, cette dernière laissant supposer une absence de chien…Lequel est évidemment présent mais caréné dans ce type d’arme ! Généralement, mais pas exclusivement, en petit calibre, avec détente encastrable.

 

 

C3. Revolver Renforcé

 Revolvers conçus plus tardivement pour une adaptation à la poudre sans fumée, en particulier pour le calibre français 8mm92. Poignée carrée et chien raccourci.

 

 

C4. Revolver Velodog

 Revolvers conçus pour la munition à poudre sans fumée de calibre 6mm centrale, à l’origine de Galand. Systèmes et formes variables, souvent à chien caréné.

 

À ne pas confondre avec les petits pistolets mono-coups dits « de cycliste » mais parfois aussi appelés vélodogs.

 

 

C5. Revolver Explorateur

 Cette appellation désigne d’imposants revolvers à grosse capacité de 8 à 12 coups, à carcasse fermée ou à brisure avec extracteur simultané. Généralement armes de petit calibre.

 

 

C6. Revolver Type Lefaucheux

 Revolvers conçus pour les munitions à broche (PinFire) brevetées par Lefaucheux en 1835. De calibres allant de 5 à 12mm, avec carcasse ouverte ou fermée.

 

 

C7. Der(r)inger de gros calibres

 La firme américaine Hammond utilisa le terme Bulldog pour baptiser un gros pistolet à un coup, chambré en 44 annulaire. Breveté en 1864, pour une production d’environ 7500 exemplaires jusqu’en 1868.

 

 

D. Le Bull Dog moderne de Charter Arms

 À ce tour d’horizon concernant les Bull Dogs, leurs dérivés et modèles apparentés, tous conçus entre 1860 et la première guerre mondiale, il nous semble utile de mentionner une arme moderne ayant repris la qualification de Bull Dog.

 

La compagnie américaine Charter Arms fondée en 1964 a introduit en 1973 un splendide revolver baptisé Bulldog (en un seul mot), en reprenant et modernisant les objectifs de Webley avec son N°2, à savoir de combiner compacité, efficacité et puissance. Le choix du calibre 44 Special se justifie pleinement dans ce contexte ! Cette arme bénéficie de tous les développements modernes : 5 coups, double action, canon typiquement de 2,5 à 3 pouces, barillet basculant, extracteur collectif, finition et robustesse impeccables.

 

Le Charter Bulldog est décliné en plusieurs finitions (standard, commémoratifs, version target, longueur du canon, matière de la poignée, etc).

 

Une anecdote pour les cinéphiles : c’est un Charter Bulldog qui a servi à l’élaboration du célèbre Blaster de Rick Deckard (joué par Harrison Ford) dans Blade Runner, l’inoubliable chef-d’oeuvre de Ridley Scott en 1982.

 

Le Charter Bulldog y fut habillé par des pièces de Steyr Mannlicher en calibre 222 modèle SL pour obtenir l’arme vue dans le film.

 

Pour en savoir plus sur le Bulldog de Charter Arms :

http://www.americancowboychronicles.com/search?q=charter+arms

 

Jean-Christophe Plaquevent 

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