UNE CURIOSITE LIEGEOISE

Notre ami Max nous présente ici un petit revolver de poche liégeois sortant de l'ordinaire, qu'à mon sens on peut classer parmi les raretés.

Il s'agit d'un petit revolver de défense très compact, à cinq coups au calibre .320 court, à détente repliable/escamotable, comparable aux nombreux modèles dérivés du British BullDog et conjugués à toutes les sauces, que l'on pouvait - librement - acquérir à la fin du 19ème siècle.

Les poinçons d'épreuve frappés sur cette petite arme nous apprennent qu'elle a été construite après 1894, sans doute entre la fin du 19è et la première Guerre Mondiale. Il ne semble pas avoir été éprouvé pour la poudre nitro.

Dès l'abord, on constate que ce petit revolver présente un gros avantage par rapport aux classiques BullDog à barillet fixe: ici, le barillet est monté sur un axe qui peut pivoter vers la gauche du bâti jusqu'à l'angle droit, exposant ainsi toutes les chambres du barillet en une fois, ce qui permet un déchargement/rechargement beaucoup plus aisés et rapides que le système classique de barillet fixe et d'extraction/rechargement cartouche par cartouche.

L'idée de base n'est pas nouvelle. On la trouve déjà en 1879 aux Etats-Unis sur le petit revolver de poche de la firme Shattuck de Hatfield, Massachussetts. Ce petit revolver américain, ingénieux mais bon marché, fait partie de la kyrielle des "Suicide Spécial" de tout acabit que l'on trouvait partout aux USA dans les années 1880.

Un bouton de blocage placé sur la droite du bouclier permet de débloquer l'axe du barillet, lequel peut à ce moment pivoter à gauche ou à droite et même à 360°, n'étant retenu que par une seule vis.

Cette vis et la came de blocage avaient une tendance marquée à s'user prématurément, ce qui rendait le Shattuck peu fiable à l'usage. C'est regrettable pour une arme qui présentait quand même un système de chargement en avance sur ses contemporains.

Notre artisan liégeois - malheureusement non identifié - a, comme c'est souvent le cas, repris l'idée de base du barillet à axe pivotant, mais en prenant soin d'en éliminer les défauts.

D'une part, il a conçu son arme de telle sorte que l'axe du barillet ne puisse pivoter que d'un seul côté, le côté opposé faisant corps avec le canon et le bâti. Ceci évite grandement un desserrement impromptu de la vis de fixation sous le canon.

D'autre part, il a prévu une came de blocage bien plus efficace, constituée d'un costaud bouton basculant placé à l'avant du bâti sous le canon et dont la partie interne s'engage dans une mortaise pratiquée dans l'axe du barillet.

Si en plus il a prévu un petit ressort plat entre l'axe et le bâti (non visible sur les photos) ou autour de la vis, il aura éliminé tout jeu.

Ces améliorations, apportées à un concept vieux d'une vingtaine d'années, font de ce petit revolver une arme fort avancée par rapport à ses contemporaines.

L'arme est également supérieure aux rares BullDogs de l'époque équipés de barillets basculants classiques, trop fragiles pour une arme de cette dimension.

Rappelons en passant que la munition de .320 Court, même à poudre noire, était méchante et amplement suffisante pour une petite arme de défense de poche.

Marcel

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